De la châtaigne innovante

Isabelle de Rosanbo a été distinguée par l’Institut du Goût Nouvelle-Aquitaine pour le sirop de fleurs de châtaignier. (Ph. S. Desgroppes)

RÉUSSITE. Avec une philosophie de travail claire et un esprit d’innovation affirmé, Isabelle et Tanguy de Rosanbo ont pris en main le Domaine de Rapatel et sa production de châtaignes.

La vie d’Isabelle et Tanguy de Rosanbo n’est pas un long fleuve tranquille depuis dix ans. Reconversion professionnelle pour les deux jeunes parents, déménagement, installation à leur propre compte en agriculture, redynamisation de l’exploitation, le couple a eu de quoi s’occuper. Une belle aventure à partager, dans laquelle ils vivent en mettant en action leurs idées et leur philosophie de vie.

Quelques années en arrière, ils étaient pourtant loin du Domaine de Rapatel qu’ils ont repris à Villefranche-du-Périgord. Isabelle de Rosanbo était en effet responsable de 65 magasins Bricomarché de treize départements dans tout le Sud-Ouest, et son mari, spécialiste sur le marché des bières du monde pour une entreprise important des produits pour la restauration. Le changement est radical.

« Notre vie d’avant ne nous convenait plus, ce n’est pas l’éthique que nous voulions donner à nos enfants, on est finalement le portrait-type des néo-ruraux », résume Isabelle de Rosanbo. Seul critère pour le couple dans ce changement de vie, s’orienter vers les filières végétales, « car se lancer dans le monde animal nous semblait être un trop grand saut ». Ils ne regrettent pas leur choix aujourd’hui.

Des idées claires

Le hasard les a fait rencontrer les anciens propriétaires du Domaine de Rapatel, qui partaient à la retraite. Le temps pour Isabelle de Rosanbo de se former, en passant son BPREA, et fin 2018, l’installation était effective pour la cheffe d’exploitation et son mari, conjoint collaborateur. Depuis, les idées se sont multipliées pour exploiter la châtaigneraie, qui s’étend sur 9,5 des 34 hectares de la ferme.

Elles suivent toute une philosophie claire et assumée : « Nous voulons tout d’abord faire redécouvrir la châtaigne, un fruit trop souvent oublié. Nous voulons surprendre en mettant ce produit là où il n’est pas attendu, nous voulons transmettre aussi, en ouvrant les portes de la ferme, en montrant ce qu’est la châtaigne et quels sont les savoir-faire autour », lance la productrice. Le Domaine de Rapatel se veut vivant.

Il est labellisé Bienvenue à la ferme, mais aussi ferme pédagogique, pour l’accueil de scolaires. « Nos portes sont ouvertes gratuitement à tous. Nous voulons montrer ce que l’on fait et comment, sensibiliser les gens à la paysannerie, s’ancrer dans le territoire, et faire prendre conscience de l’importance que les consommateurs ont dans leurs actes d’achat », affirme avec conviction Isabelle de Rosanbo.

Des produits innovants

Le Domaine de Rapatel dispose d’une boutique à la ferme, pour acheter en direct la variété de produits fabriqués. Après la récolte, qui se prépare, se réalise, et se sécurise de septembre à janvier, les châtaignes suivent deux circuits différents, selon leur destination. Une partie de la production est séchée sur place (séchoir à bois), et protégée de l’humidité. L’autre partie est congelée.

Les châtaignes séchées sont ensuite utilisées au fil de l’année selon les besoins pour produire de la farine de qualité. Celle-ci se fait sur place, avec un moulin pour la moudre et un blutoir pour la tamiser. Si une partie de la farine est vendue, le couple est aussi consommateur de sa propre farine pour la production de biscuits sucrés (cookies, palets…) ou salés (biscuits apéritifs).

Quant aux châtaignes congelées, elles sont transformées en crème de marron, en soupes avec des légumes (courges, patates douces), en confitures avec d’autres fruits (fraises, pommes…). Et ce n’est pas tout. « Nous voulons profiter de ce que nous offre l’arbre », prolonge l’exploitante. Des vins sont produits en collaboration avec des viticulteurs locaux, en faisant macérer les feuilles de châtaignier.

Même les fleurs sont utilisées, pour obtenir du sirop de fleur. C’est ce produit plus spécifiquement qui a interpellé l’Institut du goût Nouvelle-Aquitaine et les étudiants porteurs du projet Sentinelles du Goût. Fin janvier, le Domaine de Rapatel a ainsi été récompensé d’un “Goût de Cœur 2023”, une reconnaissance du travail du couple périgordin dans le respect du produit et des savoir-faire.

RÉCOMPENSE

Les Sentinelles du goût

Les “Goûts de Cœur’’ 2023 ont été remis à cinq exploitants et professionnels de l’alimentation, le 27 janvier, à l’Hôtel de région à Bordeaux. Ces derniers deviennent les “Sentinelles du Goût” de l’Institut du goût de Nouvelle-Aquitaine (IGNA), qui s’attache à l’identification, la protection et la mise en valeur de produits alimentaires et de savoir-faire culinaires traditionnels de la région. Le palmarès est issu d’un travail de réflexion mené par les experts de l’IGNA et les étudiants de la licence professionnelle Valorisation, animation et médiation des territoires, portée par l’université Bordeaux Montaigne et le lycée agricole de Périgueux. Il ne s’agit pas d’un label ou d’un cahier des charges, mais d’une distinction honorifique.

Partagez cet article
Facebook
Twitter
LinkedIn
WhatsApp
Email

Plus d'articles pour "Entreprendre"

Publiés récemment