Ne pas se contenter de mesurettes

En blocage sur les ronds-points et les axes routiers, les agriculteurs ont bien l’intention de continuer le mouvement, jusqu’à obtenir gain de cause. (Ph. Th. Mercier)

Manifestations. Face à une mobilisation nationale du monde agricole, parfois menée en intersyndical, le gouvernement a rencontré les responsables syndicaux et promet une réponse rapide.

Alors que l’autoroute A64 était bloquée depuis le 18 janvier, le gouvernement s’est donné quelques jours pour annoncer des mesures en faveur du secteur agricole. La FNSEA et les JA ont lancé un mouvement national « toute la semaine et aussi longtemps qu’il sera nécessaire ». La Coordination rurale a appelé à manifester le 25 janvier.

À la sortie d’un entretien, le 22 janvier au soir, avec le Premier ministre, Gabriel Attal, le président de la FNSEA, Arnaud Rousseau, accompagné par le président des Jeunes Agriculteurs, Arnaud Gaillot, a indiqué qu’il n’y aurait « pas de levée des actions » menées par les deux syndicats tant qu’il n’y aurait « pas de décisions concrètes » de l’exécutif. « On a besoin d’actions très concrètes », a déclaré Arnaud Rousseau devant les journalistes, assurant que le monde agricole « ne se contentera pas de mesurettes ». Sur le sujet du GNR, la FNSEA a notamment demandé une « remise immédiate en pied de facture ».

Par la voix du ministre de l’Agriculture, le gouvernement a quant à lui promis des annonces rapides : « Le Premier ministre a affirmé clairement sa volonté (…) d’aller vite, dans la semaine, pour un certain nombre de premières annonces », a déclaré Marc Fesneau à la sortie de cette réunion.

Parmi les sujets les plus urgents figurent celui des « négociations commerciales » sur les prix de l’alimentation, celui des « crises que traversent un certain nombre de secteurs », et certains sujets en termes de « simplification », a-t-il ajouté.

Appel à respecter les biens et les personnes

Plus tôt dans la journée, le président de la FNSEA, Arnaud Rousseau, avait annoncé, sur France Inter, le lancement d’actions syndicales dans toute la France, appelant le gouvernement à entendre leur « ras-le-bol » et leur « colère ». « Je peux vous dire que, dès aujourd’hui et toute la semaine et aussi longtemps qu’il sera nécessaire, un certain nombre d’actions vont être menées », a-t-il déclaré avant d’ajouter que ces actions concerneront « chaque département ».

Cet appel prend la suite du blocage de l’autoroute A64 près de Toulouse, depuis le 18 janvier. À la tête de ce mouvement local, Jérôme Bayle, éleveur de bovins viande. Interrogé par Agra presse, il fait état de trois revendications : l’annulation des hausses du GNR et la simplification de son paiement ; « de l’eau pour tous » par l’avancement des projets locaux de stockage ; et « l’indemnisation à 100 % » de la MHE (maladie hémorragique épizootique) pour le secteur bovin.

Tôt le lendemain, sur un barrage routier dans l’Ariège, une agricultrice et sa fille adolescente ont été tuées et son mari grièvement blessés. Les trois occupants de la voiture qui a foncé sur le barrage ont été interpellés et placés en garde à vue, selon une source policière. « Dans le moment particulier que vit l’agriculture, ce genre de drame est difficile à vivre », a déclaré Arnaud Rousseau, en appelant « tout le monde au calme et à la raison, et à faire en sorte que cette colère s’exprime dans le respect des biens et des personnes ».

Des actions spectaculaires

De son côté, la Coordination rurale a également appelé à manifester dans toute la France, le 25 janvier, a indiqué sa présidente, Véronique Le Floc’h, à Agra Presse, confirmant les informations du quotidien L’Est Éclair. Certains départements ont d’ores et déjà commencé à manifester, comme dans le Lot-et-Garonne, le Gers ou la Dordogne.

Dans les colonnes de nos confrères, l’éleveuse bretonne annonce un mouvement visant à dénoncer le « manque de considération » des politiques françaises et européennes envers le monde agricole. Elle évoque des opérations de « bâchage de radars » routiers – qui ont par ailleurs déjà commencé dans les départements – pour dénoncer « la suradministration », ainsi que des actions « plus spectaculaires, parce que les agriculteurs n’en peuvent plus ».

Le syndicat appelait également à se mobiliser, le 24 janvier à Bruxelles, « pour manifester leur mécontentement face aux excès de la politique agricole européenne ».

Elle était aux côtés de l’European Milk Board (EMB), coalition syndicale dont elle fait partie, dédiée à la production laitière. Une manifestation a été organisée devant le Parlement européen, ainsi que des rencontres avec des eurodéputés.

RÉACTIONS

À l’issue de leur rencontre avec le Premier ministre, Gabriel Attal, le 23 janvier :

• la Coordination rurale se dit « confiante » sur le dossier de l’énergie, qu’il s’agisse de la fiscalité du gazole non routier (GNR) ou de l’électricité. 

• la porte-parole de la Confédération paysanne, Laurence Marandola, a estimé que les premières pistes évoquées par Gabriel Attal étaient « très inquiétantes ». 

Dans un communiqué paru le 23 janvier, le Modef demande des prix planchers, rémunérateurs et garantis pour les produits agricoles alors que les discussions entre les industriels de l’agroalimentaire et les distributeurs se terminent le 31 janvier.


Le mouvement endeuillé

Une agricultrice et sa fille décèdent sur un barrage routier, dans l’Ariège.

Le mouvement des agriculteurs a été endeuillé, le 23 janvier, par la mort d’une exploitante et de sa fille, dans l’Ariège, renversées par une voiture qui a foncé sur un barrage de manière non intentionnelle, selon les premiers éléments de l’enquête.

Les victimes – une agricultrice de 35 ans, son conjoint de 40 et leur fille de 14 ans, selon le préfet – ont été renversées, mardi entre 5 h 30 et 6 h, sur un barrage routier d’agriculteurs à Pamiers. Les trois occupants de la voiture qui a foncé sur le barrage, « un couple et une de leurs amies, tous trois de nationalité étrangère » selon le parquet (de nationalité arménienne selon une précision du préfet), ont été placés en garde à vue dans le cadre d’une enquête ouverte notamment pour homicide involontaire aggravé.

« Les faits en cause ne paraissent pas revêtir un caractère intentionnel », a souligné le parquet, mettant en avant la très faible luminosité sur place « en pleine nuit », « sans éclairage public ». Le véhicule, qui s’était engagé sur la RN 20 alors que l’accès en était interdit, a percuté un mur de paille « recouvert d’une grande bâche noire », derrière lequel des manifestants se restauraient. « L’ampleur de ce qui est en train de se préparer ne sera pas modifiée par ce drame », a souligné le président de la FNSEA, Arnaud Rousseau, qui a ensuite ajouté : « Les combats continuent ».

Agrafil

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